Je suis bi !

C'est arrivé il y a 11 jours. Rue Saint-Placide. J'avais rendez-vous avec l'homme de l'art. Cent euros plus tard, j'étais bi. Notez que rien ne nous étonne. Dans la famille, vous demandez la mère et vous remontez gentiment les mailles de la tribu; quand la pelote fait des noeuds, on y trouve toujours un bi ou deux à se mettre sous la dent. Il parait que cette préférence a des accointances avec la génétique. Va savoir. C, D, G. (j'hésite à écrire leurs prénoms)  presque tous les ainés des frères et soeur de Maman sont officiellement bi. L échappe à l'appel de ce curieux droit d'ainesse: ouf, c'est à lui que reviendrait le titre si par hasard la France retrouvait un roi. On dit que ma grand-mère maternelle (putain d'ascendant)  avait parfois de drôles d'idées et des pulsions un peu morbides. Elle n'a jamais dit son dernier mot, elle était muette depuis lurette le jour de sa mort. Dans ses livres préférés, on a retrouvé quelques signes de protestation et d'aquiescement. Bonne Maman entourait les mots doux (jésus, amour, dieu, saint, religieuse, financier etc... ) et barrait les intrus (sexe, diable, sein, plaisir). Etonnant ce rejet des bonnes choses quand on sait l'histoire passionnelle de mes grands-parents, plus amants que parents si l'on entend la légende familiale. 

Je suis bi II. Ce qui veut dire que la dépression l'emporte sur l'exaltation. Chez ces gens là (les bi II donc), on ne parle pas d'épisode maniaque mais d'hypomanie.  C'est beaucoup plus soft, et en société, ça passe presque inaperçu. Admettons: je n'ai pas encore défilé cul nu un 14 juillet. Soit: je ne me prends pas pour Dieu (tout le monde ne peut pas en dire autant). Quand je dépense un peu trop... mon jiminy reste en alerte et me baillonne tant bien que mal. Mais J'ai connu le goût de cette merveilleuse énergie qui éclaire les jours et les nuits, les idées et les corps.  Je regrette ces heures pleines qui compensaient largement les jours en apnée. 

PS: changement de typo. J'aime bien le courier new