Le verbe vif
"Tu es trés forte avec les mots"... C'était dit comme un compliment les premiers temps de la rencontre. Aujourd'hui, c'est un air de méfiance. Et moi je ne sais pas ce qu'il faut penser de cette facilité à manier le mot. D'autant moins que mes années noires ont bien entamé l'aisance. Je n'ai plus la souplesse d'avant la souffrance. Je peine à écrire. Je cherche le sens et l'orthographe. Souvent J'hésite, parfois je trébuche. Et puis nos temps de silence ont si bien dérouté la confiance que je ne sais plus prendre mon bâton de pèlerin pour te convaincre de ne pas guerroyer contre nous. J'ai renoncé à te dire que je me noie quand nous ne dormons pas ensemble, chacun à l'autre extrémité du lit. Quand enfin les peaux se rejoignent, annonçant l'heure du calumet, je sais bien que tu trouveras le moment pour conclure à mes torts. Jamais tu ne prends sans réserve ta part du mauvais gâteau.